lundi 1 mai 2017

Le Laocoon : Virgile décrit-il la sculpture ?


illustration : groupe du Laocoon. Marbre, copie d’un original hellénistique de 200 av. J.-C. environ. 
Provenance : thermes de Trajan, en début d’année 1507. Musée Pio Clementino, Vatican.



Nec deinde multo plurium fama est, quorundam claritati in operibus eximiis obstante numero artificum, quoniam nec unus occupat gloriam nec plures pariter nuncupari possunt, sicut in Laocoonte, qui est in Titi imperatoris domo, opus omnibus et picturae et statuariae artis praeferendum. Ex uno lapide ehm ac liberos draconumque mirabiles nexus de consilii sententia fecere summi artifices Hagesander et Polydorus et Athenodorus Rhodii. 

Il n’y a pas beaucoup d’autres artistes qui aient atteint à la gloire. Car, pour certains chefs-d’œuvre faits en commun, le nombre des auteurs a été un obstacle à la réputation de chacun d’eux, un seul ne pouvant en recueillir toute la gloire, et plusieurs ne pouvant être cités au même titre : ainsi en va-t-il du Laocoon, dans le palais de Titus, qui doit être mis au-dessus de tout ce qu’ont produit la peinture et la sculpture. Fait d’un seul bloc, ce groupe comprend Laocoon lui-même, ses enfants, les serpents aux merveilleux replis. Ce groupe a été fait de concert par trois excellents artistes de Rhodes : Hagésandre, Polydore et Athénodore.
 PLINE l’Ancien, Histoire Naturelle, XXXVI, 37


Texte de Virgile racontant le mythe : (Énéide, II, 199 sqq.)
trad. : Anne-Marie Boxus et Jacques Poucet (Bibliotheca Classica Selecta - UCL)
Ici, un autre prodige, plus grave et beaucoup plus effrayant, se présente aux malheureux et trouble leurs cœurs déconcertés. Laocoon, désigné par le sort comme prêtre de Neptune, immolait selon les rites un énorme taureau sur les autels. Or voici que de Ténédos, sur des flots paisibles, deux serpents aux orbes immenses – ce récit me fait frémir – glissent sur la mer et, côte à côte, gagnent le rivage. Poitrines dressées sur les flots, avec leurs crêtes rouge sang, ils dominent les ondes ; leur partie postérieure épouse les vagues et fait onduler en spirales leurs échines démesurées. L’étendue salée écume et résonne ; déjà ils touchaient la terre ferme, leurs yeux brillants étaient injectés de sang et de feu et ils léchaient leurs gueules sifflantes d’une langue tremblante. À cette vue, nous fuyons, livides. Eux, d’une allure assurée, foncent sur Laocoon. D’abord, ce sont les deux corps de ses jeunes fils qu’étreignent les deux serpents, les enlaçant, les mordant et se repaissant de leurs pauvres membres. Laocoon alors, arme en main, se porte à leur secours. Aussitôt, les serpents déjà le saisissent et le serrent dans leurs énormes anneaux. Par deux fois, ils ont entouré sa taille, ont enroulé autour de son cou leurs échines écailleuses, le dominant de la tête, la nuque dressée. Aussitôt de ses mains, le prêtre tente de défaire leurs noeuds, ses bandelettes sont souillées de bave et de noir venin. En même temps il fait monter vers le ciel des cris horrifiés : on dirait le mugissement d’un taureau blessé fuyant l’autel et secouant la hache mal enfoncée dans sa nuque. Mais les deux dragons s’enfuient en glissant vers les temples, sur la hauteur, gagnent la citadelle de la cruelle Tritonienne, et s’abritent aux pieds de la déesse, sous l’orbe de son bouclier.

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